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Stupide ? Ou juste timide ?

La timidité, un handicap invisible...


Les gens sont cruels dans leurs jugements. C’est une réalité. En tout cas dans notre société du paraître et de la compétition. Celui qui est différent, qui ne rentre pas dans

les codes est forcément jugé. La mode est à la «grande gueule», celui qui n’a pas peur de s’exprimer, quitte à rabaisser les autres; celui qui est sûr de lui, qui avance dans la vie avec assurance. On prône l’arrogance plutôt que la modestie, à être populaire plutôt que discret.

Alors, tout naturellement, une personne timide, discrète, voire effacée, qui s’exprime peu, est considérée comme stupide et n’ayant rien à dire.

Cette obligation de performance sociale, liftée sur un seul modèle, laisse peu de chance à ceux qui ne sont pas «adaptés». La question est, avons-nous tous les même capacités d’expression?

Est-ce qu’une personne qui ne parle pas n’a forcément rien à dire ou a-t-elle quelque chose qui l’empêche de s’exprimer ?

Je connais tellement bien ce problème, étant une ancienne timide maladive. M’exprimer, étant jeune, était un calvaire, une montagne insurmontable. Et pourtant, les idées, les pensées, les mots fourmillaient dans ma tête. J’avais envie de répondre

aux autres, de discuter, d’avoir des échanges «normaux». J’avais ce désir de m’exprimer, de laisser sortir ce qui m’animait intérieurement. Mais impossible. Les phrases se formulaient dans ma tête, descendaient dans ma gorge, mais y restaient coincées. Pas moyen de les faire sortir. C’est comme si une barrière invisible se dressait entre moi et les autres. J’étais comme dans une prison de verre, les murs de ma prison ne se voyaient pas, mais pourtant ils étaient bien là, solides, infranchissables.

Quelle frustration en découlait... Chaque minute je laissais échapper l’occasion de dire et montrer qui j’étais, ou du moins ce que mon esprit était capable de créer. Je passais alors pour quelqu’un de stupide, d’inintéressant. Et peu de personnes s’intéressaient

réellement à moi d’ailleurs. Les quelques amis que je me suis fait à l’époque, au lycée par exemple, je peux dire que ce sont de vrais amis. Ils ont été en profondeur, ont cherché à me connaître vraiment, et font toujours partie de ma vie à l’heure actuelle.

J’ai été harcelée pendant toute ma scolarité du fait de ma timidité. J’ai même subi le harcèlement d’une professeur de français au lycée. Et à l’époque, il n’y avait pas de sensibilisation à ce propos, on n’osait pas en parler, encore moins quand il s’agissait de prof. J’ai donc subi en silence, de la primaire à mon bac. Ça s’est enfin apaisé à la faculté, car je crois que la maturité et les études supérieures donnent d’autres intérêts aux gens.

Mais le jugement a continué, parfois dans des cercles d’amis, où j’étais encore mal comprise. En grandissant, ma réserve était perçue non plus comme de la stupidité mais comme de la vanité. Parce que je ne parlais pas beaucoup, on me voyait comme quelqu’un de très fier, et ayant une grande confiance en elle, alors que c’était tout le contraire. J’ai toujours manqué d’assurance, et d’affirmation de moi. C’est bien le problème de toute ma vie. Poser des limites vis-à-vis des autres, dire non, me respecter, a toujours été compliqué. J’avais peur de froisser l’autre, et d’être mal vue. La difficulté à voir ma propre valeur m’a aussi handicapée. Je me plaçais toujours à un niveau inférieur aux autres. Ma timidité rajoutait une couche à mon mal-être et à mon incapacité à être Moi. J’avais envie de briser ma prison, de faire exploser ces murs, de laisser sortir qui j’étais à l’intérieur. Mais la peur du jugement me tétanisait. La peur de ne pas être à la hauteur des autres, et de ne pas être aimée, me bloquaient sur place. Au final, comble de l’ironie, j’ai été jugée, insultée, humiliée et mal-aimée, pour ce que je n’étais pas.


Il m’a fallu des années pour comprendre d’où venait le problème et le résoudre.

Il m’a fallu me confronter à des situations pénibles, sortir de ma zone de confort, me battre contre mes peurs, me forcer à changer, à évoluer, pour avancer. Étape par étape, j’ai gagné en assurance, en estime de moi-même et en qualité relationnelle. Aujourd’hui, le fait que je me filme pour créer des vidéos, que je les poste sur youtube, ou que j’écrive et me dévoile ainsi en public, est un autre effort sur le chemin qui m’amène vers l’expression de moi-même, et c’est une preuve qu’on est chacun capable de bien plus qu’on ne croit. Nous devons, individuellement, faire voler en éclat ces parois de verre qui nous ont que trop longtemps bloqués.

L’espoir, c’est que universellement, l’accession de chacun à sa vraie nature et à ce qui le fait vibrer, par somme et expansion exponentielle, permette un radical changement de notre société, qui ne considérera plus la différence comme une tare et les inintégrés comme des idiots. Nous avons tous une richesse, qui ne demande qu’à être exploitée. Mais le plus important en réalité, c’est que nous voyions nous-même notre richesse, notre valeur, que nous soyons enfin honnêtes et sincères envers nous-même, peu importe le regard des autres.



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